Il y a des mots qui viennent sans prévenir, qui traversent le corps et viennent s’écrire, sans réfléchir.
Ce texte est un de ceux-là, écrit un soir après minuit, d’une traite, sans y mettre d’intention, juste en le laissant être, me cueillir et parler pour moi.
J’ai tout de suite senti que ce texte était là non seulement pour moi, mais aussi — et avant tout — pour être partagé.
À la mémoire de toutes les femmes, qui portent en elles et dans leurs lignées les mémoires d’abus.
À la lueur de la bougie allumée ce soir-là, j’éclaire et je vous livre une partie de mon histoire, mon empreinte dans ce monde, en espérant que ces mots puissent vous apporter soutien, force, résilience, libération.
Entrailles
2025
Dans le silence de mon être, j’entends.
J’entends les louves qui hurlent.
Les hurlements qui protègent.
Mon corps, mon essence, mes petits, ma personne, tout mon être.
Les louves qui protègent mon territoire,
Mon ancrage,
Mon sang,
Ma terre.
Pas celle où je suis née non,
Celle où je réside,
Celle qui m’a choisie,
Celle dont je suis l’élue.
Au cœur du cœur des cris des louves,
J’entends le torrent de la rivière.
L’eau coule,
Elle emporte mes tourments les plus profonds.
Les lave.
De l’eau qui coule comme des larmes qui traversent.
Venues d’une autre terre elles aussi,
D’un autre sang.
Des larmes immatérielles – Et bien réelles pourtant.
Bien réelles.
Je suis ton sang, qu’elles disent.
Mon sang a trop coulé.
Débordé.
Ensanglanté ma vie,
Mon corps.
Mes entrailles, perforées.
Reviens-moi, cher corps, reviens-moi.
Toi qui as tant enduré.
Toi qu’on a tant détruit.
Reviens-moi en entier,
Comme au premier jour – ou presque.
Reviens-moi
Sans les traumas,
Le sang,
Les viols
Et autres abus qui perforent mon âme.
Qui hantent mes nuits,
Qui hantent mon lit
Et ceux des autres.
Il y a ceux qui essaient.
Et ceux qui n’y comprennent rien.
C’est pas de leur faute, à ces hommes-là
À qui on n’apprend rien.
Rien qui vaille.
Que de la paille souillée
Au goût de patriarcat qu’on vomit.
Qu’on vomit
Jusqu’au bout du monde.
Jusqu’au bout du lit.
Jusqu’au bout de la nuit.
Maëlys Le Peutrec